Mon histoire, ou comment une psychologue en ligne m’a relevée de ma dépression
24 février 2015, pas de commentaire , dans Actualités Psychothérapie
Je m’appelle Emilie, j’ai 27 ans, et j’ai été dépressive.
Ca n’est pas arrivé d’un coup, et pourtant j’ai eu la nette impression de m’en être rendue compte brusquement, comme si je m’étais lentement sentie m’enfoncer sous l’eau, le regard fixé sur la surface miroitante comme pour nier que je m’en éloignais, et qu’était soudain arrivé le moment où l’air m’avait manqué.
Je n’ai jamais été quelqu’un de très sociable, j’ai toujours préféré les sorties en petit comité aux grosses soirées, et je tiens beaucoup au temps que je passe seule. Mais il y a 2 ans, cela faisait plusieurs mois que mon travail devenait de plus en plus exigeant. Evidemment, à mesure que mes journées s’allongeaient, mes soirées raccourcissaient, et le temps solitaire dont j’avais besoin n’étant pas compressible, c’est mon temps de sociabilité qui a encaissé. Au début, mes amis s’inquiétaient pour moi. Et puis les mois ont passé, et moi-même ne savais plus si j’avais envie de les voir. On se trouve plein d’excuses quand on est pris dans un engrenage de fatigue et de tristesse. D’abord on se dit qu’on les verra quand on sera reposé, et puis on se convainc que le film qui passe ce soir-là a l’air vraiment bien, que manger chez soi c’est toujours une économie, que si on est motivé on sortira plus tard dans la soirée pour les rejoindre. Et puis comme un muscle qui se ramolli, la capacité à agir s’éteint. Moins on en fait, moins on en fait. Et un jour, l’air manque, et ce qu’on pensait être une routine confortable et vaguement anti conformiste se transforme soudain en une prison de solitude. Au bout de quelques mois, découragés, certains amis ne me sollicitaient presque plus. D’autres continuaient, voire s’inquiétaient pour moi, mais je les repoussais sans même m’en rendre compte. Car accepter de l’aide revient à admettre que l’on a un problème. C’est là tout l’enjeu.
Quand le coup de mou devient dépression
Les réseaux sociaux sont cruels : je n’ai pas tardé à constater que les soirées que je dédaignais autrefois souvent par choix me paraissaient beaucoup plus attrayantes maintenant que mon inertie nouvelle m’en interdisait l’accès. J’assistais derrière mon écran aux événements nouveaux que partageaient mes amis et dont je n’avais aucune idée.
Le sentiment de n’avoir pas d’importance, de regarder le monde tourner.
Isolée, je ne sortais de chez moi que pour mon travail, et encore de façon occasionnelle, puisque mon poste me permettait d’exercer depuis chez moi la plupart du temps. Avec le recul je me rends compte que ça a accéléré mon mal être, coupée du monde toute la journée comme je l’étais. J’ai fini par me sentir déplacée et mal à l’aise à l’extérieur de chez moi lorsque j’en sortais pour autre chose que des raisons professionnelles. Ma sœur, qui est un peu l’inverse de moi et a peu le temps de m’appeler entre son poste, sa famille et sa vie sociale trépidante – ou du moins qui m’est toujours apparue comme telle – a même pris le temps, inquiète, d’avoir quelques longues conversations avec moi. Elle me conseillait de prendre rendez-vous avec un psychologue, mais encore une fois je n’étais pas prête à accepter de l’aide. Je voulais continuer à croire que ça n’était qu’une phase, que le monde reprendrait bientôt ses couleurs. Mais chaque jour il les perdait un peu plus, jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien qu’un gris uniforme et cotonneux.
Besoin d’aide, comment trouver un psychologue ?
Un jour, après avoir raccroché avec elle, j’ai ouvert mon navigateur et j’ai tapé « dépression ». Ca a été une prise de conscience. Les témoignages étaient tous différents, et pourtant tous parlaient de moi, de ce qu’il m’arrivait en ce moment. J’ai réalisé que j’avais besoin d’aide, au moins pour entendre le diagnostic de la bouche d’un professionnel. Maintenant je me dis que j’aurais dû agir avant, mais je pense que sur le moment c’était un vrai processus, une démarche personnelle qu’il m’a fallu construire pas à pas. Au fil de mes recherches sur internet, je suis tombée sur Doctair, un site de consultations de psychologues en ligne. Au début j’ai trouvé le concept surprenant : je pouvais choisir mon psychologue sur fiches parmi une liste de professionnels agréés et partenaires du site, valider mon choix, puis sélectionner une date et une heure de rendez-vous pour la visioconsultation. Je trouvais le tarif abordable pour une consultation de 45 minutes avec des professionnels agréés. Bien qu’il s’agisse d’une visioconsultation, il me semblait normal qu’elle soit payante ; un psychologue en ligne gratuit aurait d’ailleurs plus éveillé ma méfiance qu’autre chose, car maintenant que j’avais pris ma décision, que j’étais décidée à demander de l’aide, je voulais un vrai professionnel. J’ai noté l’heure et la date de mon rendez-vous, et je me suis sentie soulagée. J’avais fait le premier pas, et ç’avait été tellement plus simple qu’en cherchant à l’extérieur :
Comment trouver une bonne adresse, sans demander à son entourage, que d’une part j’avais réduit, et à qui d’autre part je ne voulais pas révéler l’ampleur du problème ?
Comment trouver le courage de sortir et d’affronter le regard d’un inconnu de chair et d’os, alors que j’avais déjà du mal à accepter la visite d’un ami ?
Et une fois sur internet, comment trouver un psychologue en ligne, un professionnel spécialiste de la dépression dont je pensais souffrir et en qui je pourrais avoir toute confiance ?
Tout faire depuis chez moi, avec la caution d’un site sérieux appuyé par l’association France Dépression, ça me semblait à la fois plus simple et plus sûr. Pas de doutes sur les compétences du professionnel que je vais rencontrer, pas de trajet, pas de salle d’attente. Il n’y avait que moi, ma peine, et de l’autre côté de mon écran, une main tendue.
Le jour dit, je me suis connectée. La psychologue que j’avais choisie était très chaleureuse, très attentive, ça m’a rassurée.
Au début c’était un peu étrange de communiquer par écrans interposés. Mais je m’y suis rapidement habituée, et finalement le fait d’être chez moi dans mon environnement m’a permis d’être rapidement à l’aise. Nous avons commencé doucement, en nous présentant, puis elle m’a demandé ce qui m’avait poussé à prendre ce rendez-vous. Quand j’ai commencé à le lui expliquer, j’ai senti ma gorge se nouer. Pendant un instant j’ai eu peur d’être tournée en dérision tellement les raisons de ma peine me semblaient soudain futiles. Je ne suis pas heureuse parce que je suis seule, et je suis seule parce que… Parce que quoi ? Parce que je ne réponds pas sur Facebook ? Parce que je préfère regarder la télé le soir ? Ca me semblait soudain pathétique. C’est là que j’ai compris à quel point j’avais bien fait d’en parler avec un professionnel plutôt qu’avec un proche. Ils n’auraient pas compris, ils m’auraient dit de me reprendre en main, une main sur l’épaule et une sortie au ciné pour faire passer le tout.
Mais pas elle. Elle m’a écoutée, et elle a mis des mots sur ce que je vivais. L’isolement. Le manque de confiance en moi. La perte de plaisir au quotidien. Et surtout cet engrenage fatal qui m’entrainait à me replier sur moi-même pour oublier que je n’étais pas digne du monde extérieur, barrant ainsi la route à toute tentative dudit monde extérieur de me prouver le contraire. En définitive, elle a lâché le mot que je redoutais tout en l’espérant parce qu’il mettait un nom sur ma souffrance, le mot que je pressentais, qui résumait tout : la dépression.
Le crédo de Doctair, en parler c’est déjà se relever
wwww.doctair.fr
Beaucoup de gens pensent que la dépression, c’est la tristesse, le désespoir. J’avais effectivement des phases de ce genre, où je me vidais de toutes les larmes de mon corps. C’étaient des moments de souffrance intense, presque physique. Mais la plupart du temps, la dépression n’est rien de tout ça. En fait, elle n’est rien du tout. JE n’étais rien du tout. Rien d’autre qu’un vide immense, un néant total qui englouti toute émotion, tout intérêt. Plus rien ne me faisait envie, plus rien n’éveillait mon intérêt, plus rien. Je me sentais comme une enveloppe vide, un automate sans but et sans raison d’être.
Cette première consultation m’avait libérée d’un certain poids. J’avais trouvé un soutien, mon mal être était entendu et reconnu. Je n’étais pas guérie, loin de là, mais j’avais maintenant un lien physique avec le monde. Enfin, un lien virtuel en réalité, puisqu’il s’agissait de consultations en ligne. A la fin, nos avons pris un autre rendez-vous, et au fil des consultations j’ai entrevu la possibilité de ma guérison. C’allait sans doute être long, mais je ne voulais pas rester dans cet état de vide. Alors je me suis accrochée.
Petit à petit, elle et moi avons progressé. J’ai pris sur moi pour revoir certains de mes amis, à petite dose au début, pour limiter le risque d’avoir des « crises d’absence », comme je les appelais, et qui arrivaient lorsque je me sentais soudain extérieure à la discussion en cours, pour X raisons. A ce moment là, mon regard redevenait vague, et je retombais dans un état léthargique et lointain. A nouveau le vide, le rien. Ces moments arrivaient fatalement, et une fois dans cet état il m’était dur de supporter l’interaction sociale.
Ma psychologue me soutenait, au fil de nos conversations en ligne. Je la retrouvais chaque semaine, et cela m’aidait à persévérer dans mes efforts. Elle disait que j’en étais capable, que je méritais une belle vie, et je voulais la croire. Parfois je rechutais, et c’était d’autant plus dur qu’au début j’avais eu peur de la décevoir, comme j’avais toujours eu peur de décevoir tout le monde autour de moi. Mais elle n’était jamais déçue. Elle comprenait, me remettait sur les rails fermement, et me poussais à nouveau vers le monde extérieur, comme un parent apprenant à son enfant à faire du vélo sans les roulettes.
Et aujourd’hui…
Il m’a fallu plusieurs mois de thérapie, mais petit à petit ma vie a retrouvé des couleurs. Mes phases d’angoisse extrême se sont espacées, avant de finalement devenir anecdotiques. J’ai recommencé à croire que je n’étais pas un poids pour mon entourage, et à passer de bons moments avec mes amis. Il m’arrive toujours de faire des « crises d’absence », mais elles sont plus rares et je sais comment m’en débarrasser.
Aujourd’hui j’ai des rêves et des projets, et j’ai même rencontré quelqu’un, un homme merveilleux qui a si bien chassé les dernières angoisses qui m’oppressaient.
Comme quoi le bonheur attire le bonheur.
J’aimerais que mon témoignage aide d’autres personnes qui se trouvent aujourd’hui dans la détresse que j’ai vécue il n’y a pas si longtemps, tout comme j’ai moi même trouvé ma solution au travers de ceux que j’ai lus par hasard sur internet, un jour où tout semblait gris.
Je voudrais dire qu’il existe aujourd’hui des solutions pour aider ceux qui, comme moi il y a deux ans, ne voient pas d’issue à leur mal être, parce qu’ils ne supportent plus leur vie, pensent ne plus jamais aimer l’essence même de leur personne, parce qu’ils sont certains que sortir de chez eux ne ferait que donner l’occasion au monde extérieur de froncer le nez de mépris devant eux, et qu’ils en souffrent.
Vous n’avez pas besoin d’affronter tout de suite le regard du monde. Vous avez d’abord besoin d’aide. Les psychologues en ligne peuvent vous aider, comme ils l’ont fait pour moi.
Courage.
Emilie